Jean Royère (1902-1981)
Né à Paris dans une famille bourgeoise cultivée et stricte, qui allie des origines provinciales à une grande ouverture sur le monde, Jean Royère manifeste très jeune son goût pour la décoration. À l’âge de trente ans après avoir tenté de suivre une carrière plus conforme à la volonté de ses parents, il fait de brillants débuts de décorateur. Se pliant pendant les premières années, avec facilité et talent, aux contraintes d’un fonctionnalisme incontournable, il se montre parfaitement apte à réaliser du mobilier de série.
Le boudoir qu’il présente au salon des artistes décorateurs de 1939 marque de manière provocante le retour de l’ornement dans la décoration. Des premiers motifs, comme le chevron ou la sinusoïde, aux formes biomorphiques, du fauteuil Éléphanteau au lampadaire Liane, Royère développe dès lors avec virtuosité toutes les combinaisons d’un répertoire ornemental très personnel. Fin observateur de la société qui l’entoure et attentif à la création contemporaine, il découvre dès la fin des années 30 chez les Scandinaves et les Italiens, notamment Alvar Aalto et Gio Ponti, des formes nouvelles et surtout une éthique dont il saisit l’importance et qui seront déterminantes pour l’évolution de son travail.
Jean Royère entre 1931 et 1972 a réalisé plus de mille projets à travers le monde -de l’aménagement de la cité ouvrière d’Aplemont, dans le Nord de la France, à la décoration du palais du Shah d’Iran-, créant avec légèreté et humour un style en rupture totale avec le passé. Il est étonnant de voir combien ce style, qui évoque si justement le désir de liberté et d’insouciance d’une époque, correspond à certaines aspirations très actuelles et garde aujourd’hui toute sa séduction.
Pierre-Emmanuel Martin-Vivier. Jean Royère.
Préface de Jean-Louis Gaillemin.
Avec la participation de Jacques Lacoste.
Editions NORMA. 2002. Paris.